[Les Aventures d'Olga Andreivna Mikroff "Goupiline"] Récits de partie

[Frère Jonas, le nautonier du monastère. Un ivrogne capable de ramer ivre mort dans le noir et d’endurer tout et n’importe quoi pourvu que ses bouteilles soient avec lui.
incarné par Lucie. ]

Empire de Russie, 04 Septembre 1901
Monastère d’Ararat, prêt du Lac Bleu, région des lacs à la frontière de la Finlande, sous domination Tsariste.

18H, les vêpres viennent de sonner. https://www.youtube.com/watch?v=D4H4I2XrXLo&feature=BFa&list=PLD8EAB4F8F849CA92]

Un homme vêtu d’une robe de bure, en sandales est allongé de travers sur sa couche. La cinquantaine, ventru, sa barbe grisonnante encadre une face rougeaude. Il sommeille en grommelant vaguement. Tout à coup, l’on frappe timidement à la porte. L’homme se lève et va ouvrir.
Un jeune novice est derrière, il baisse la tête devant l’haleine empestée d’alcool et de sommeil pâteux.
« Frère Jonas, notre supérieur désire te voir, c’est toi qui est de passage ce soir. Il désire te voir immédiatement, ce soir c’est un peu particulier… »

L’homme suis le novice, cela a sans doute à voir avec le ravitaillement des 3 Saints Vénérables sur l’Île de l’Hermitage. Le Père Vitali, le supérieur du Monastère, est un homme de taille moyenne, sec, aux longs doigts noueux. La soixantaine, énergique à l’excès, les traits tirés, la prospérité du Monastère et de la petite ville qui l’entoure est en grande partie sa réussite. Sous sa direction, le refuge des ermites s’est transformé en une véritable petite ville à la pointe du progrès qui attire les riches pèlerins de Saint Pétersbourg. Hôtels de luxe, air vivifiant, promenades en navires sur le lac et promesse de purification en échange de quelques dons attirent ses derniers. Par ailleurs Vitali a mis en place toute une filière de pêcherie, de saumure, et de culture de pomme de terre sous serre électrique avec laquelle il fabrique la « Bloutschicka », une vodka locale aromatisée à la menthe qui a le mérite de dissimuler (un peu) l’haleine d’alcool.

« Bien, Frère Jonas, ce soir, comme d’habitude vous allez faire le chemin jusqu’à l’île. Vous prenez votre barque, vous ramez jusqu’à l’île des Saints Vénérables. Vous devez faire vite car dans une heure, les Saints Vénérables devront être dans leur cellule à prier pour notre bon Saint Basile. »

Vitali toussote, gêné… « Hum, ce soir, il y a un petit quelque chose de spécial… chaque jour, le plus âgé des 3 Saints nous dit, selon la règle de la phrase unique, ce dont il a besoin pour les 3. On n’est pas sûr d’avoir bien compris sa dernière phrase mais on suppose qu’il a la… hum … qu’il a du mal à se retenir disons. Ce n’est guère surprenant étant donné son âge mais tout de même… J’ai fait préparer quelques plantes par Antipe, notre herboriste. Il pourra les boire avec la Bloutschicka, ça devrait le soulager… »
Le supérieur se penche et tire une caisse dissimulée derrière son bureau… « Bon, ils ont l’alimentation pour une journée… quelques produits… les herbes… 6 bouteillles de « Bloutsch »… ça m’embête d’ailleurs de vous envoyer vous… » Le Père Vitali jette un regard critique à la gourde qui pend à la ceinture de corde de Frère Jonas, celui-ci fait mine de ne rien remarquer et lui jette un regard le plus innocent possible.
« Ho, ça va Frère Jonas, je sais bien que vous n’avez pas fait vœu d’abstinence à l’alcool, que vous priez mieux ivre mort qu’à jeun, mais tout de même… j’enverrai quelqu’un demain, si les bouteilles ne sont pas arrivées, c’est Frère Herkales qui vous corrigera ! Il n’a pas fait vœu de non violence, LUI ! » Vitali secoue alors la tête, semblant regretter une erreur de jeunesse…
« Bon allez, dépêchez vous. Vous avez ce qu’il faut, je suis désolé de devoir vous presser un peu, mais Frère Ilarie a été blessé à l’élevage de vipères et vous devez le remplacer ce soir. Prenez deux novices avec vous pour porter la caisse jusqu’à la barque, vous ne m’avez pas l’air très réveillé encore. »

Frère Jonas, enfin seul dans sa barque, commence à ramer en direction de l’île. Le temps presse, il doit impérativement donner la cargaison avant le coucher du soleil. Tout juste le temps de faire la traversée… un vent frais, froid même, souffle dans le bras de mer entre le Monastère et l’île. Le vénérable alcoolique ne part heureusement jamais sans carburant. Il attrape la gourde pendant à sa ceinture et la vide d’un trait ! Ayant encore un peu de sang dans son alcool et ainsi réchauffé, le Frère Jonas traverse aisément les quelques dizaines de mètres le séparant de l’île. Heureusement que celle-ci ne bouge pas !

Les 3 Saints Vénérables attendent, debout devant la grotte, le capuchon cousu. On ne leur voit que la bouche et les yeux. Selon la règle, ils n’ont droit qu’à une phrase par jour pour communiquer avec l’extérieur. Les 3 moines inclinent la tête en recevant la marchandise, ils n’auront le droit d’y toucher que demain à l’aube, consacrant la nuit à leurs prières et lectures. « Frère Diomède est malade, préparez-vous à l’élection d'un nouveau Saint Vénérable».

Frère Jonas incline la tête et rame dans l’autre sens en direction du monastère. Le vent est de plus en plus froid. Ses bras sont lourds, sa robe de bure lui pèse. Il prendrait bien quelques lampées pour que le retour soit plus rapide, malheureusement, tout le « remontant » a été brûlé à l’aller ! Il y aurait cependant une solution… La « Bloutschicka, la Vodka des Dieux », est faite à partir de l’eau glacée du lac, de pomme de terre fermentée et de menthe. Il suffirait donc de boire dans les bouteilles livrées aux moines et de compenser avec un peu d’eau du lac. Au pire, même si ils se doutent de quelque chose, ils accuseront un quelconque novice à la distillerie…

C’est vrai qu’elle est bonne la Bloutschicka dans le gosier de Frère Jonas. Ce petit goût mentholé qui élimine l’haleine alcoolique a du en sauver plus d’un dans les foyers ! Guère étonnant que le Père Vitali en vende jusqu’à Iaroslav!


[musique d'ambiance de la séquence: https://www.youtube.com/watch?v=lveYWdncajQ&feature=BFa&list=PLD8EAB4F8F849CA92&lf=BFa ]

Frère Jonas rame, rame. Il s’est rarement senti aussi bien, aussi fort, aussi droit dans sa barque ! Il rame à toute allure vers le Monastère. Enfin, on dirait bien hein. Il n’a aucune raison que le Monastère ait changé de place d’ailleurs. Donc ça doit être par là. On rame dans un sens pour aller, on rame dans l’autre sens pour le retour. « Elémentaire, mon cher ! », comme aurait dit un célèbre Londonien.

Il y a tout de même quelque chose d’étrange… Une lumière vient de trouer la nuit, à quelque distance derrière lui. La ville et le monastère devrait être devant lui pourtant ? Frère Jonas aurait il ramé de travers ? Le moine se retourne pour vérifier… et se dit immédiatement que le slogan du Père Vitali pour sa Bloutschicka, ben ya ptêt quelque chose de vrai !

Une lumière étincelante irradie au dessus de l’eau. Une lueur blanche, violente même, d’une vivacité telle qu’elle dessaoulerait quiconque ne serait point un fidèle adorateur de Bacchus! Plus curieux, une silhouette noire se détache dans la clarté. Les bras ouverts, elle semble avancer sur l’eau, vers Frère Jonas. Celui-ci n’aurait il déjà plus une seule goutte de sang dans son alcool ? ça peut être amusant, mais si le truc en noir marche vraiment sur l’eau, va peut être falloir le crucifier comme l’autre. Ou alors arrêter de boire? Non, il vaudrait peut être mieux le crucifier. Et puis c’est pas comme si c’était nouveau pour lui… tandis qu’arrêter de boire, tout sauf ça pour Frère Jonas !

A la réflexion… il est tout de même un peu étrange cet ange, même pour le vénérable buveur. A-t-on déjà vu un ange sans ailes ? Vêtu de noir qui plus est ?
« Dis leur… Dis leur, âme simple… qu’ils arrêtent… qu’ils arrêtent… trop de luxe… trop d’hommes… trop de débauches en ce lien sain. J’ai vécu dans le silence, j'ai servi dans le silence, j’ai prié dans le silence… Ils ont tout souillé… qu’ils arrêtent… qu’ils laissent ce lieu en paix, qu’il redevienne ce qu’il a toujours été… Va et dis leur… VA, et porte mon message…»
Âme simple, pour sûr, Frère Jonas l’est ! Après 20 ans à courir les mers glacées du nord, il apprécie la retraite tranquille que lui offre le monastère. Nourri, logé, abreuvé, peu de ses anciens camarades de chasse peuvent en dire autant. La plupart pourrissent au fond de l’eau, quand une baleine un peu plus revendicative que les autres décidait de ne pas se laisser faire. Les plus chanceux trainent à mendier dans les quartiers portuaires, espérant avoir assez au soir pour un repas et une table au chaud dans un coin de taverne.

Frère Jonas rame, rame à toute allure. Que faire ? Attendre jusqu’à demain pour en parler ? Dévaliser les provisions du maître cellier pour se refaire une santé ? Aller réveiller le frère de garde et tout lui raconter ? Non, non, mieux vaut aller dormir. On risquerait de jaser, on le traiterait de tous les noms. Peut être même que le Père Vitali le mettrait au pain sec et à l’eau pendant 8 jours ? Frère Jonas n’est pas Fils de Dieu, lui au moins pouvait changer l’eau en vin. Mieux vaut passer une bonne nuit de cuvage, et réfléchir à tout cela demain. Ce soir, on l’accuserait encore d’avoir trop forcé sur la bouteille. Ce n'est point parce qu'on est moine que l'on est moins médisant.

[Fin du Prologue, 1H15 de jeu.]

Je ne pensais pas que c'était aussi long de mettre en forme un compte-rendu de partie MSN!

@ tous:

J'espère que c'est lisible et que ce n'est pas trop ennuyeux. C'est la toute première fois que je masterise, j'espère m'en tirer honorablement. Si vous avez des conseils, que ce soit sur le contenu ou la façon de rédiger n'hésitez pas. Tous les conseils sont bons à prendre pour moi et je ne recule jamais devant la critique constructive, d'autant que je crois que vous avez tous plus de pratique que moi que ce soit en joueur ou en tant que MJ!

Bonne lecture à tous et bonne nuit!